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Une coalition à l’assaut des accords TISA et TTIP

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Le Courrier | 22 juin 2016

Une coalition à l’assaut des accords TISA et TTIP

par Laura Drompt

ONG, syndicats et partis ont lancé hier la fronde contre les traités tant décriés. Ils exigent qu’ils soient soumis à référendum.

«Nous sommes scandalisés par la manière dont se déroulent les négociations.» Hier, une lettre a été adressée au ministre de l’Economie et président de la Confédération, Johann Schneider-Ammann, par une coalition d’ONG, de syndicats et de partis politiques. Leur cible? Les traités de libre-échange TISA (Accord sur le commerce des services, entre 53 pays) et TTIP (Accord de libre-échange transatlantique entre les Etats-Unis et l’Union européenne).

La lettre demande que soient publiés les contenus exacts de ces deux accords, pour l’heure tenus secrets, et de soumettre dans tous les cas les résultats des négociations ainsi que les accords conclus au référendum populaire.

Deux demandes auxquelles le Département fédéral de l’économie (DEFR) ne peut donner suite pour l’heure. «Comme pour tout accord international, explique Erik Reumann, porte-parole du DEFR, les textes des accords négociés seront publiés après leur signature par les parties.» Soit environ au mois de mars prochain.

Référendum possible?

Pour le vote populaire, Erik Reumann explique qu’«il est trop tôt pour déterminer si l’accord TISA sera soumis au référendum ou non». «Cette question sera tranchée par le parlement dans le cadre de la procédure d’approbation», ajoute-t-il.

Pas de quoi rassurer l’alliance constituée contre ces accords. Selon ses représentants, plus le temps passe, plus les traités s’affinent, empêchant tout retour en arrière. Avec un mécanisme de «listes négatives» prévues par TISA, par exemple. «Ces listes signifient que tous les secteurs sont libéralisés, à moins qu’ils ne soient expressément exclus par des réserves, décrypte Isolda Agazzi, d’Alliance Sud. Or un gouvernement n’a pas forcément la vue d’ensemble de tous les secteurs susceptibles d’être libéralisés au moment de la signature du traité. Encore moins de ceux qui pourraient surgir à l’avenir.»

Socialistes et Verts soutiennent cette coalition anti-traités. Jean Christophe Schwaab (PS/VD) a dénoncé hier «une attaque frontale contre l’emploi». En Suisse, les mesures d’accompagnement à la libre circulation, les salaires minimaux cantonaux, les restrictions d’horaires des magasins ou la sécurité au travail pourraient être touchés par TISA ou TTIP. «Ces traités visent à supprimer toute ‘entrave au commerce’. Or, dans une vision néolibérale, la protection des travailleurs est une entrave au commerce.»

Zones «hors-TISA»

Son homologue verte Maya Graf (BL) s’est pour sa part réjouie d’observer la création de zones «hors-TISA» à Genève, Lausanne, Berne ou Bâle, et a relevé les manifestations qui ont récemment eu lieu à Berlin contre l’accord entre l’Union européenne et les Etats-Unis. «Nous ne menons pas un combat contre l’UE ou les Etats-Unis, mais un combat pour la démocratie», a-t-elle ajouté.

Certaines lois spécifiques, telles que l’interdiction des poulets au chlore, des camions de plus de 40 tonnes, de rouler la nuit pour les routiers ou de produits jugés dangereux en Suisse mais pas aux Etats-Unis, risqueraient de disparaître, malgré un fort soutien populaire, ont noté les ­intervenants.

Par ailleurs, des tribunaux arbitraux seraient chargés de trancher d’éventuels litiges entre transnationales et pays, alors que «leurs membres ne sont pas démocratiquement désignés, et malgré des problèmes de conflits d’intérêts», a relevé Jean Christophe Schwaab.

Erik Reumann, du DEFR, maintient toutefois que la Confédération prend part aux négociations afin «d’assurer que les résultats s’inscrivent dans les limites des dispositions légales en vigueur en Suisse» et «de garantir que la Suisse pourra continuer de réglementer les secteurs des services sur son territoire».

Pour ce qui concerne le TTIP, le Département de l’économie veille à la compétitivité de la Suisse, et promet de «prendre en considération la situation économique globale de la Suisse, de même que les aspects sociaux et environnementaux».


 source: Le Courrier