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Va-t-on jeter l’APE aux oubliettes ?

Haïti Press Network

Le Nouvelliste | 29 juin 2018

Va-t-on jeter l’APE aux oubliettes ?

par Dieudonné Joachim

Economie -

En dépit de la position apparemment claire exprimée par le secteur privé haïtien sur l’Accord de partenariat économique (APE), le Parlement ne s’est jamais prononcé sur cet accord que le pays a signé en décembre 2009. Lors d’une vidéo-conférence organisée le 29 novembre 2017, entre des représentants de l’Union européenne, de l’État et du secteur privé haïtien, les responsables des différentes parties ont fait le point sur la question.

Par la suite, Haïti devait enfin signer l’accord depuis janvier 2018. Dans les délais qui ont suivi cette rencontre, les parties haïtiennes n’ont pas pu trouver une formule pour convaincre les parlementaires à se prononcer sur l’Accord de partenariat économique. Le secteur privé s’était même dit prêt à prendre part à un plaidoyer en faveur de la ratification de l’APE.

Lors de cette réunion, l’UE, par la voix de son représentant, avait notamment souligné qu’Haïti, en tant que PMA qui a de plus subi, depuis 2009, des évènements tragiques, mérite un traitement spécial et différencié, notamment la mise en place en matière de coopération de moyens spécifiques pour le renforcement institutionnel et le développement du secteur privé.

Frantz Bernard Craan, coordonnateur du Forum économique du secteur privé, avait déclaré, en novembre 2017, que le secteur privé haïtien ne s’oppose pas à l’APE, mais exige des modifications sur la liste d’exclusion et dans l’exposé des motifs à présenter pour sa ratification. Il souhaite aussi que certaines dates soient reconsidérées.

Le patron du secteur privé avait rappelé alors qu’Haïti avait négocié, en 2008-2009, une liste d’exclusion, qui mettait un certain nombre de produits de côté afin de protéger des secteurs de l’économie, en particulier l’agriculture. Maintenant, dit-il, cette liste d’exclusion qui était valable en 2009 doit être modifiée. Neuf années après, des évolutions sont constatées. « Des pans de l’économie méritent protection comme le ciment par exemple », a-t-il fait remarquer en précisant que la cimenterie nationale peut produire suffisamment de ciment pour les besoins du pays.

Les positions du secteur peuvent paraître significativement claires dans les déclarations publiques de ses responsables. Mais qu’est-ce qui empêche l’État haïtien de statuer avec science sur la question ? Cela permettrait de lancer de nouveaux signaux vers l’extérieur. Une façon de traduire notre sérieux dans les engagements internationaux. On ne peut pas continuer à souffler le chaud et le froid en même temps avec des partenaires commerciaux et adopter le maronnage comme stratégie face à une telle proposition.

Les APE sont loin d’être la panacée qui va résoudre tous les problèmes d’Haiti ; mais, à écouter certains cadres du BAQOZ, des membres du secteur privé des affaires, des membres du secteur de l’assemblage et surtout l’ambassadeur de l’Union européenne, cet accord offre certains avantages qu’Haïti se doit de considérer avant de fermer la porte définitivement des discussions concernant une éventuelle ratification de l’APE. En matière d’investissement direct étranger, ces accords représentent une belle carte à jouer pour la partie haïtienne.

Ce n’est point le moment d’utiliser la langue de bois. Les responsables haïtiens doivent prendre clairement leurs responsabilités dans cette affaire. Si on ne veut pas de l’APE, que les décideurs, notamment ceux de l’exécutif et du législatif, se prononcent ouvertement.


 source: Le Nouvelliste