Samir. Maroc vs Corral au CIRDI: Le tribunal arbitral constitué, dossier prêt à l’examen

Medias24 | 29 octobre 2018

Samir. Maroc vs Corral au CIRDI: Le tribunal arbitral constitué, dossier prêt à l’examen

Au Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Washington), le Tribunal arbitral chargé de statuer sur le litige opposant le Royaume du Maroc à Corral Morocco Holding AB (Suède) est officiellement constitué, apprend-on sur le site de l’organisme rattaché à la Banque Mondiale.

L’instance arbitrale sera composée de:

 Luca G. Radicati di Brozolo. Ce juriste italo-britannique siègera en tant que président. Il a été nommé par accord des parties;

 L’américain Robert H. Smit, nommé par Corral, la demanderesse;

 Et l’italienne Loretta Malintoppi, nommée par le défendeur, le Royaume du Maroc.

Le tribunal ainsi constitué, cela ouvre la voie au début de l’examen du de ce dossier inscrit en mars 2018 suite à une requête de Corral, société détenue par le saoudien Hussein Al Amoudi. Dans ce litige, le Maroc sera conseillé par le Cabinet Allen & Overy (Naciri & associés). Le cabinet international Gibson Dunn accompagnera Corral.

Actionnaire majoritaire de la Samir, Corral accuse le Maroc de ne pas avoir respecté ses engagements contenus dans le contrat d’achat d’actions (Share Purchase Agreement - SPA) conclu lors de la privatisation de la raffinerie en 1997, lit-on dans la requête dont Médias24 détient copie.

Le contrat en question contenait, selon le même docuement, "un certain nombre de promesses que le Maroc a faites à Corral dans une Liste de Spécifications". Celles-ci incluaient, entre autres, une obligation du Maroc "de maintenir puis d’éliminer progressivement les tarifs douaniers susceptibles de protéger la Samir de la concurrence dans le marché marocain des importations étrangères de produits pétroliers raffinés bon marché."

Seulement, après l’incendie de 2002, le Maroc "a suspendu les tarifs douaniers sur l’importation des produits pétroliers raffinés qu’il avait promis de maintenir dans les Spécifications". [L’incendie avait provoqué l’arrêt du raffinage, et l’Etat avait libéré les importations pour approvisionner le marché: NDLR]. La même année, poursuit Corral, "la défenderesse a entrepris la révision de la formule des prix qui a entraîné une réduction considérable de la marge de profit de la Samir".

Des événements qui préfiguraient, selon Corral, que le Maroc "était prêt à abandonner ces protections quand cela servait ses intérêts économiques et/ou politiques", accuse la société suédoise.

Plus loin dans la requête, Corral s’attarde sur un autre grief, soutenant qu’à partir de 2012, le Maroc a "illégalement" autorisé "le dumping non contrôlé de produits pétroliers raffinés sur le marché marocain, détruisant la position concurrentielle de Samir".

Le Maroc est ici accusé de "n’avoir pris aucune mesure pour prévenir l’importation illimitée de produits raffinés low-cost de l’étranger, y compris le développement de produits raffinés à prix cassés". Ce que la requérante considère comme "une violation" de la loi marocaine et du cadre régissant le commerce international.

"La décision de Samir consistant à investir le marché en aval a suscité la colère de l’Etat marocain", commente Corral, qui revient sur la création de SDCC, sa filiale spécialisée dans la distribution pétrolière de détail et de gros. La société affirme avoir été menacée de devoir quitter le Maroc si elle poursuivait son projet dans la distribution. "Lorsque la Samir a commencé à développer SDCC en 2014, un représentant du distributeur marocain de pétrole Afriquia, détenu par M. Aziz Akhannouch, le Ministre de l’Agriculture de la Défenderesse, a prévenu la Demanderesse qu’elle serait forcée de quitter le pays si la Samir refusait de se retirer du marché de la distribution en aval".

"L’effondrement du prix du pétrole en 2014 a détérioré la situation financière de la Samir et a donné à la défenderesse une opportunité de sortir Corral du Maroc", poursuit la même source, qui accuse l’Etat marocain de lui "avoir exproprié son investissement" auquel il "n’a pas accordé un traitement juste et équitable et une protection entière".

"Le Maroc a traité l’investissement de Corral de manière moins favorable que l’investissement d’un acteur national ou d’une entreprise d’un Etat tiers", estime la Holding.

Résumé des griefs

En gros, on reproche à l’Etat marocain d’avoir, "dans sa conduite de l’investissement de Corral, violé de nombreuses protections accordées" à cette dernière en vertu du traité bilatéral d’investissement conclu en 1990 entre la Suède - Corral est suédoise - et le Maroc.

Ces "violations" sont résumées, à titre non exhaustif, comme suit:

 "Manquement à l’imposition des tarifs douaniers d’importation de produits pétroliers raffinés à rebours des attentes légitimes de Corral;

 Manquement à l’application de la législation marocaine interdisant le dumping des produits pétroliers raffinés au Maroc;

 Manquement au niveau de la prise des mesures nécessaires pour garantir la compétitivité de la Samir;

 Le gel arbitraire et illégal des comptes bancaires de la Samir;

 Le fait d’avoir empêché illégalement et arbitrairement des navires de s’amarrer au port Mohammedia; [il s’agit en réalité d’un problème financier: Marsa Maroc a refusé de réaliser les opérations de déchargement en raison d’une ardoise de 44,5 MDH].

 Manquement à l’obligation de fournir un environnement légal transparent et prévisible..."

Que demande Corral au Cirdi?

 de déclarer que le Maroc n’a pas respecté ses obligations tels que contenus dans le TBI et le droit coutumier international;

 d’ordonner au Maroc de réparer l’ensemble des préjudices subis par Corral et consécutifs à la violation du droit international pour un montant qui sera déterminé durant la procédure;

 d’ordonner le paiement d’intérêts non compris dans les dommages et intérêts et qui comprennent les intérêts après sentence sur toutes les sommes à un taux établi sur la base du montant de la condamnation;

 d’ordonner au Maroc de payer l’ensemble des coûts de l’arbitrage y compris les honoraires et les frais des consultants, les frais administratifs et les frais du CIRDI, les honoraires et frais du tribunal arbitral avec des intérêts de retard après sentence.

Enfin, dans le même document, Corral se réserve "le droit de fournir, en temps voulu, plus de précisions quant à l’estimation des dommages et pertes".

source : Medias24

Printed from: https://www.bilaterals.org/./?samir-maroc-vs-corral-au-cirdi-le