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L’ALBA, une nouvelle aube ?

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L’ALBA, une nouvelle aube ?

par Esperanza Martinez

L’aube qui apporte la lumière, ne peut se baser sur l’obscurité pétrolière...

L’Amérique latine sème son espérance avec plusieurs mouvements et processus liés à la terre. Le Mouvement des Sans Terre au Brésil, les mouvements indigènes en Equateur et en Bolivie, le mouvement zapatiste au Mexique, entre autres.

De la même manière, il y a de fortes attentes de par la présence de gouvernements démocratiques dans plusieurs pays qui se sont proposés d’en finir avec l’hégémonie de l’impérialisme et qui proposent de nouveaux schémas d’intégration en opposition à la Zone de Libre-Echange des Amériques (ZLEA, ALCA en espagnol), l’Initiative d’Intégration de l’Infrastructure Régionale d’Amérique du Sud (IIRSA) et le plan Puebla-Panamá. Dans ce contexte surgit l’Alternative Bolivarienne pour les Amériques (ALBA). [1]

L’intégration est devenue un futur inévitable, tant pour ceux qui aspirent à perpétuer un modèle de conquête que pour ceux qui veulent s’en libérer.

Pour les Etats-Unis, l’Amérique latine devra jouer un rôle de fournisseur de matières premières et, fondamentalement, d’énergie, d’eau et de biodiversité, indispensables pour soutenir son modèle agro-industriel et de surconsommation énergétique.

Pour leurs détracteurs, l’Amérique devra chercher des chemins pour rompre avec la dépendance et devra reconstruire des Etats réduits à la plus simple expression comme stratégie du néolibéralisme. (...)

Amérique latine : exporter de l’énergie et importer des aliments

L’Amérique latine est un large continent, avec 20,559 millions km². Elle est bien plus grande que l’actuelle Union européenne. Par ses caractéristiques écologiques, elle possède une grande diversité tant agricole que sylvestre, de l’eau douce en abondance, du soleil toute l’année dans la majorité des pays, sans conditions climatiques extrêmes, avec le souvenir encore présent d’avoir contribué à la domestication de la majorité des produits agricoles : pomme de terre, cacao, manioc, maïs, haricot, soja, tomate, fruits... C’est à dire avec les meilleures conditions possibles pour l’agriculture. Mais l’Amérique latine possède aussi d’importants gisements de gaz et de pétrole, base de l’actuelle matrice énergétique des pays industrialisés.

D’autre part, les Etats-Unis, qui ont développé un modèle agro-industriel intensif, sont très déficitaires en énergie et misent pour cela sur le contrôle des gisements de toute l’Amérique latine. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les Etats-Unis ont produit en 2005 quelque 6 millions 830 mille barils de pétrole par jour, alors qu’ils en ont consommé 20 millions 655 mille, c’est à dire plus de trois fois leur production. Alors que l’Amérique latine en a produit 10 millions 723 mille et en a consommé 6 millions 754 mille [2]. La différence, elle l’exporte justement aux Etats-Unis. Il se passe la même chose pour le gaz : aux Etats-Unis de 565,8 milliards de mètres cube de gaz en 2001, la production a baissé à 525,7 en 2005. Par contre, en Amérique latine, on constate une augmentation soutenue de l’extraction, qui passe de 102,6 milliards en 2001 à 135,6 en 2005.

La stratégie des Etats-Unis est de détruire l’agriculture de nos pays pour nous soumettre à des conditions de dépendance et nous transformer en acheteurs de leurs produits, et, en même temps, aspirer l’énergie de tout le sud du continent.

Le président des Etats-Unis a affirmé en 2001 : « Pouvez-vous imaginer un pays qui ne soit pas capable de cultiver suffisamment d’aliments pour nourrir sa population ? Ce serait une nation exposée à des pressions internationales. Ce serait une nation vulnérable. Et donc, quand nous parlons de l’agriculture américaine, en réalité, nous parlons d’une question de sécurité nationale » [3].

Le résultat est une véritable guerre contre les campagnes et l’agriculture en Amérique latine et l’impulsion donnée à un modèle qui nous force à exporter de l’énergie et à importer des aliments.

Tel a été le modèle et l’intensifier était le but des accords de libre-échange. Et ces objectifs ont déjà façonné quelques pays fortement urbains en Amérique latine et dans les Caraïbes.

Les chiffres actuels parlent de 75,2% de population urbaine en Amérique du Sud et de 64,7% en Amérique centrale et dans les Caraïbes. La tendance est à l’augmentation de ce lent abandon de la campagne, que ce soit pour la recherche des services publics des villes comme pour l’occupation toujours plus grande de leurs terres par des produits d’exportation, qui utilisent peu de main d’oeuvre et beaucoup d’eau et d’énergie. Le rare appui aux programmes agricoles dans les différents pays de la région a été destiné, non à ceux qui produisent des aliments au niveau national, mais aux grands exportateurs ou à ceux qui pillent les matières premières. Le développement de l’identité urbaine des pays a cultivé chez nous un mépris presque religieux de la terre.

Le ZLEA, l’IIRSA, et le PPP

Les accords de libre-échange dessinés depuis l’empire pour l’Amérique, comme le sont l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), l’Accord de libre échange Etats-Unis Amérique centrale (CAFTA, sigles en anglais), la Zone de Libre-Echange des Amériques (ZLEA), les traités de libre-échange andins et bilatéraux avec les Etats-Unis, ont pour objectif de soutenir le modèle d’extraction de ressources ou de matières premières, en « primarisant » [4] les économies du Sud et en renforçant un modèle industriel impérial. Pour cela, ils ont besoin de la libre circulation des marchandises (énergies, eau et biodiversité) mais pas des personnes.

Pour ce modèle, les propositions d’intégration passent fondamentalement par la construction d’une infrastructure énergétique tels que des oléoducs et gazoducs, des lignes électriques, il y a en outre les corridors d’infrastructures et ceux des ressources naturelles, ces derniers sont appelés corridors multimodaux. Et il faut en plus élever un mur pour empêcher la circulation des personnes et obtenir que dans l’illégalité leur travail soit de moins en moins cher.

Pour répondre à ces besoins d’infrastructures, plusieurs projets ont été articulés comme l’Initiative pour l’Intégration de l’Infrastructure Régionale Sud-Américaine (IIRSA) et le plan Puebla-Panama, qui sont totalement articulés aux accords de libre-échange tels que l’ALENA, le CAFTA, le MERCOSUR et, dans la région andine, avec les traités bilatéraux avec la Colombie, l’Equateur et le Pérou.

Ces corridors multimodaux incluent des lignes électriques, des interconnections et des corridors d’oléoducs, de gazoducs, de « minéroducs », qui relient les centres d’extraction aux centres de commercialisation ou de traitement. De la même manière, les corridors d’eau peuvent être les bassins naturels, les voies d’eau artificielles ou toute sorte de conduites pour l’eau douce de consommation industrielle, rurale et humaine. Les corridors de transports incluent des routes, des autoroutes, des voies ferrées, des ports. Tous rendent possible l’accès à et le contrôle des ressources naturelles : énergie, minéraux, biodiversité et eau.

Un élément clé de ces schémas d’intégration est le rôle des transnationales. Ce sont elles qui dans la pratique peuvent exécuter et tirer profit des intégrations. Des entreprises comme Chevron sont finalement des entreprises clés dans la mise en place des stratégies énergétiques nord-américaines et acquièrent toujours plus de présence dans la région, tout comme Monsanto dans la production agricole.

L’intégration selon l’ALBA

Dans la proposition de l’ALBA, impulsée par Hugo Chavez et Fidel Castro, contrairement à ce à quoi nous ont habitués les traités commerciaux, on accorde de l’importance au renforcement des Etats et les droits humains, du travail et de la femme, de l’environnement, toujours ignorés dans les propositions économiques, sont reconnus. Y sont soulignés l’importance de l’agriculture et le risque qu’il y a à ne pas la protéger de l’inondation de biens agricoles importés et c’est à partir de ces critiques qu’a été promu le démantèlement de la ZLEA.

On pourrait s’attendre sous ces prémisses à une réforme des politiques agraires pour que l’agriculture soit reconnue comme un secteur fondamental pour le développement économique et social des pays. Il serait nécessaire de parler de la conservation des écosystèmes et du développement d’activités durables. On pourrait espérer qu’on ferme la porte aux transnationales... mais, au contraire, on encourage une structure de pays exportateurs de matières premières et ceci dans un silence préoccupant par rapport aux transnationales.

Les objectifs de l’intégration sud-américaine ont beaucoup d’aspects positifs, du point de vue de la rupture de la dépendance régionale avec les Etats-Unis, mais favoriser une intégration économique régionale justement sur la base du pétrole qui est le fer de lance de la stratégie de ce pays, peut être une erreur fatale. Le pétrole — et le gaz —, une ressource sujette à la gestion transnationale et des élites, qui n’obéissent pas aux intérêts des peuples et provoquent de graves impacts environnementaux et sociaux, tant locaux que nationaux.

Les pas qui ont été faits dans les propositions d’intégration sont concrètement la construction de gazoducs... avec eux, dans la pratique, on est en train de revivre et de promouvoir les projets d’intégration promus depuis les Etats-Unis.

En 2005, Uribe [président colombien, ndlr] a déclaré : « Nous serions avec le président Torrijos [Panama]`pour formaliser l’entrée des pays au plan Puebla-Panamá et que là on signe un acte pour l’intégration de ce gazoduc, la construction de la ligne d’interconnexion électrique et la progression dans la construction de la route ». [5]

Le 8 juillet 2006, la triade (Colombie, Venezuela et Panama) de présidents scellait, dans un acte solennel, le premier tronçon du Gazoduc transcaribéen qui sera long de 225 kilomètres. Le second tronçon arriverait jusqu’à la ville de Colón au Panama. « Le Panama s’approvisionnera non seulement en gaz pour la consommation de son marché interne, mais, en plus, il deviendra une place réexportatrice pour les côtes atlantiques et pacifiques ». [6]

Dans le cas du Gazoduc du sud, celui dont on fait le plus de publicité dans la région, il s’agit d’un mégaprojet qui relierait plusieurs pays dans la région, il correspond aux plans du Groupe de Travail du Réseau de gazoducs du sud formé dans le cadre de l’IIRSA, et dont l’objectif était d’encourager le libre-échange.

Ce projet, appelé le Grand Gazoduc du Sud, a été catalogué comme l’un des plus ambitieux du continent. Pour son développement, on prévoit que la construction s’étendra sur 8 000 kilomètres et qu’elle embrassera l’axe oriental de Caracas à Buenos Aires. Ce gazoduc distribuera quelques 4 246 500 mètres cubes d’hydrocarbures dans sept pays latino-américains. Le critère suivi est que dans la mesure où le secteur du gaz naturel croît, l’intégration évitera que l’offre reste limitée. Les conduites en cours de construction impliquent, d’une part, d’augmenter l’extraction actuelle de gaz et, bien qu’on parle de la destiner à l’Amérique latine, elle sera destinée à des activités industrielles et elle arrivera éventuellement aux Etats-Unis pour satisfaire ses demandes.

Il s’agit de conduites qui affecteront les principales sources d’eau douce de la région , qui traverseront les principaux bassins hydrographiques et qui feront de toute la région une zone de catastrophes environnementales parce que les fuites, les égouttements, les explosions et les incendies sont inévitables.

De même, dans sa traversée de l’Amazonie, outre les milliers de communautés indigènes qui vivent dans des conditions de haute vulnérabilité, les peuples indigènes isolés volontairement seront mis en danger car ils seront aussi touchés.

Pour les gazoducs il faut construire des routes. Une fois construites, elles deviendront des veines ouvertes et des blessures incurables, elles seront donc une porte ouverte pour l’entrée de marchands de bois, de trafiquants de terre, de biodiversité et de mineurs.

Tout cela avec la certitude que l’expérience apporte, que les économies basées sur l’industrie pétrolière ne servent qu’à un développement démesuré des dépenses et à une augmentation dangereuse de la dépendance, des politiques d’accaparement, qui appauvrissent et excluent et dont le caractère discrétionnaire, la corruption et l’impunité sont les meilleurs alliés.

Que se passe-t-il dans le monde pétrolier ?

Maintenir le pétrole au cœur des propositions d’intégration est une erreur sur toute la ligne. Il n’est pas possible de garantir un contrôle souverain de ces activités, ni faisable de parler de redistribution des richesses et c’est finalement une source de destruction des territoires et des richesses naturelles.

Indépendamment du fait qu’il y a encore dans la région des entreprises pétrolières nationales, comme le sont PDVSA (Venezuela), PETROECUADOR (Equateur), ECOPETROL (Colombie), PEMEX (Mexique), et d’autres, nous voyons dans tous les pays de quelle façon le commerce du pétrole est allé en se privatisant :

 Dans la prospection : l’Etat accorde des permis d’exploration et n’a pas l’information... Halliburton est la principale entreprise d’exploration et possède l’information sur les principaux gisements. En Colombie par exemple, Halliburton est propriétaire de la Banque d’information pétrolière. Quand l’Etat accorde une concession, toute la population perd le droit de pénétrer dans la zone de la concession ; les entreprises privées y installent des contrôles stricts et personne ne peut entrer sans autorisation de l’entreprise même s’il s’agit de territoires indigènes ancestraux.

 Dans l’extraction : des concessions sont octroyées à des entreprises, des transnationales en général, qui leur donnent des droits, généralement sur 20 ou 25 ans. Quand ce sont des entreprises nationales qui opèrent, entrent aussi en jeu les entreprises sous-traitantes, pour les divers besoins. Dans la pratique, l’opération se trouve entre des mains privées, Ce sont elles les bénéficiaires, ce sont elles qui décident de la technologie et entretiennent un modèle par lequel elles ne se responsabilisent pas des impacts occasionnés..

Les entreprises privées, qu’en général les instances du gouvernement ne contrôlent pas, ont l’habitude d’extraire la ressource le plus vite possible, parce que tout ce qui les intéresse, ce sont les rentrées économiques. Les conséquences de cette surexploitation des gisements porte préjudice économiquement à l’Etat et à l’environnement car elle produit une plus grande quantité de déchets qui, normalement, sont rejetés dans les sources d’eau, polluant les écosystèmes, ce qui affecte énormément les communautés locales.

 Dans le transport : la construction de conduites, présentée souvent comme des investissements, est réellement la façon de prendre le contrôle du transport de brut et de gaz. La majorité des oléoducs et des gazoducs sont déjà contrôlés par le privé et les nouveaux projets seront exécutés par des entreprises transnationales. Le passage de ces conduites implique la perte de droits territoriaux des communautés qui habitent sur leurs routes.

En Equateur, il existe un oléoduc de brut lourd géré par sept entreprises transnationales. Celles-ci exploitent aussi le brut. En contrôlant le transport, elles gèrent et contrôlent aussi la production de brut lourd dans le pays.

 Dans le raffinage : la capacité de raffinage est entre des mains privées. Les raffineries publiques sont en cours de privatisation. La santé et les écosystèmes des communautés sont affectés, à cause de la pollution et de la destruction des forêts et parce que l’équilibre écologique est touché.

 La distribution : la distribution appartient à des réseaux privés, c’est ce qui fut privatisé en premier. Ces réseaux contrôlent les dérivés du pétrole. Au nom de l’économie, les entreprises font pression sur les prix des dérivés sur les marchés locaux, ceux-ci étant dans la majorité des pays du Tiers Monde et plus élevés qu’aux Etats-Unis. Les communautés urbaines perdent le contrôle de leurs lieux d’habitation, elles deviennent des zones de danger et de pollution.

 La consommation : du point de vue de la société, il y a une série de droits qu’a la population. Cependant, la privatisation de tout transforme ces droits en services, ce qui fait que l’on parvient vraiment à transformer des citoyens en clients au pouvoir d’achat plus ou moins grand.

 Le nettoyage : une fois révélés les graves impacts de l’activité pétrolière, et le fait que le nettoyage et la réparation sont imposées par des décisions nationales ou par la pression communautaire, des processus commencent à être mis en place qui privatisent tout le travail de réparation.

Quand une fuite de brut a lieu, les entreprises privées sont plus intéressées par nettoyer leur image que par nettoyer la fuite, c’est pour cela qu ‘on commence par militariser la zone pour que personne ne prenne de photos de la pollution et, comme personne ne les contrôle, les entreprises effectuent des travaux de nettoyage insuffisants. Ensuite, elles se paient le luxe de dire que sur les sites d’opération il n’y a pas de fuite.

 La gestion environnementale : plusieurs des contrôles environnementaux sont effectués actuellement par les entreprises privées elles-mêmes, elles auditent leurs propres actions. Il n’y a pas de transparence. Les communautés et l’Etat lui-même perdent la capacité de contrôler, d’inspecter, d’auditer.

La souveraineté énergétique est-elle possible ?

Dans le débat sur la souveraineté, il y a deux tendances qui s’affrontent entre elles. D’une part, la tendance « globale », qui impulse les privatisations comme stratégies de contrôle des ressources et des marchés et, d’autre part, la défense des souverainetés nationales.

Mais l’alternative « privatisation-souveraineté » va plus loin que la confrontation entre l’entreprise privée et l’Etat. Entre elles, ce qui est en jeu, c’est la communauté. Qui doit avoir l’accès, le contrôle et la capacité de décision sur les richesses naturelles ? Qui contrôle finalement les territoires où se trouvent ces richesses ?

La souveraineté est le thème le plus important contre l’impérialisme. Il y a pourtant des thèmes centraux qui ne sont pas pris en compte, l’un est le rôle des transnationales et l’autre, celui des communautés et de leurs territoires.

Il arrive que, malgré les discours nationalistes, des accords soient passés avec les entreprises transnationales qui cèdent - temporairement - des bénéfices à condition de s’enraciner dans la région. Et il arrive, de plus, que, souvent au nom de la souveraineté nationale, des infractions soient commise contre cette même souveraineté parce que l’Etat prend la défense des intérêts transnationaux ou d’élites nationales.

Un vrai débat sur la souveraineté doit placer le thème des communautés, leurs priorités, leurs besoins, leurs aspirations et le respect de leurs droits au premier plan. Il doit de plus imposer des limites à ces transnationales qui n’investissent pas mais saccagent les ressources et en vivent.

La souveraineté signifie accès d’une part, mais aussi contrôle d’autre part. Et elle signifie surtout le contrôle sur toutes les phases de la production-consommation, sous trois prémisses de base :

 Pour garantir la vie et l’avenir, il est nécessaire de garantir la durabilité et la santé de la nature.
 Un modèle indépendant, autonome et libertaire doit s’appuyer sur la souveraineté.
 On ne peut pas parler de bien-être et de durabilité si on ne parle pas de justice et d’équité.

La véritable souveraineté est la récupération par les communautés du contrôle sur leurs richesses et, en même temps, l’expression de l’indépendance de l’Etat face aux intérêts des transnationales. C’est la seule voie pour satisfaire les besoins et c’est une opportunité pour rechercher, intelligemment, ces façons de satisfaire les besoins sans sacrifier d’autres ressources.

Changer la matrice énergétique de nos pays et parier sur des sources décentralisées, variées, de faible impact, est un impératif. Construire la souveraineté et la durabilité simultanément, en pensant aux communautés et à l’Etat simultanément.

Il nous faut parler d’une intégration du point de vue d’une nouvelle civilisation, non pétrolière, qui développe de nouveaux mécanismes macroéconomiques, financiers, politiques et culturels, qui permettent de reconstruire la paix, l’équité entre les peuples, de recouvrer la santé de tous et de restaurer l’environnement, de renégocier la dette financière internationale et de compenser le saccage des pays du Sud, d’assurer la justice et la démocratie véritable partout et, surtout, de construire une souveraineté, et, pour cela, l’idéal, c’est d’agir avec un agenda d’unité régionale.

Mais développer une stratégie d’intégration en construisant des infrastructures contrôlées par des transnationales peut signifier justement livrer sur un plateau d’argent à l’empire tout le continent et ses richesses. Ce sont les efforts décentralisés, autonomes, variés qui empêcheront que nous soyons conquis.

Il faut bien comprendre qu’à l’horizon une crise totale de la civilisation pétrolière nous guette, mais la sortie de cette crise n’est pas en marche. Au contraire, sa sortie est retardée dans la mesure où on lance des oléoducs, des gazoducs, des raffineries qui nous lient au pétrole. Ceci bien que les traits les plus décadents de la crise, comme le sont les guerres, la militarisation, la violence, les maladies, les changements climatiques apparaissent de façon toujours plus mortifère.

Il n’y a pas d’obscurité plus noire que celle qui précède l’aube. Les mythes indigènes qui font référence à un nouveau jour qui se lève ont entretenu l’espérance pendant des centaines d’années, mais l’ALBA, si elle veut apporter la lumière, ne peut pas se baser sur l’obscurité pétrolière...

Les opinions exprimées et les arguments avancés dans cet article demeurent l’entière responsabilité de l’auteur-e et ne reflètent pas nécessairement ceux du Réseau d’Information et de Solidarité avec l’Amérique Latine (RISAL).

En cas de reproduction de cet article, veuillez indiquer les informations ci-dessous :

RISAL - Réseau d’information et de solidarité avec l’Amérique latine
URL : http://risal.collectifs.net/

Source : Bilaterals.org (http://www.bilaterals.org), janvier 2007.

Traduction : Cathie Duval, pour le RISAL (http://risal.collectifs.net).

Notes:

[1[NDLR] Notons que le mot « alba » en castillan signifie aube en français.

[2BP, Statistical Review of World Energy, juin 2006.

[3George W. Bush, juillet 2001, dans un rapport de Jean Ziegler, rapporteur spécial de l’ONU sur le Droit à l’alimentation.

[4[NDLR] Le secteur primaire est le secteur économique qui concerne la collecte et l’exploitation directe de ressources naturelles (matériaux, énergie et certains aliments).


 source: RISAL