Dette : l’Argentine prête à verser 50 millions à BNP Paribas

Les Echos | 23 mars 2016

Dette : l’Argentine prête à verser 50 millions à BNP Paribas

par Isabelle Couet

Dans le sillage des accords avec les fonds « vautours », Buenos Aires accepte de verser 52 millions de dollars à BNP Paribas. La banque détenait des créances argentines depuis plus de dix ans.

Improbable. Parmi les derniers créanciers de l’Argentine passés entre les mailles du filet des restructurations de dette, les fonds « vautours » ont accaparé toute la lumière. Notamment Elliott, le « hedge fund » du milliardaire américain Paul Singer . Ces investisseurs aux méthodes musclées, qui acculent des Etats aux abois à leur rembourser chèrement des créances acquises à prix cassé, ont obtenu de la nouvelle équipe au pouvoir à Buenos Aires un accord portant sur plusieurs milliards de dollars. Mais ils ne sont pas les seuls à s’être manifestés. Parmi les autres créanciers, se trouve notamment une banque : BNP Paribas. Selon les déclarations du médiateur en charge de conduire les discussions entre Buenos Aires et ses porteurs obligataires, BNP vient aussi de conclure un accord de principe, qui débouchera sur le versement de 52,4 millions de dollars si le¨Parlement argentin donne son feu vert. La banque n’a pas souhaité faire de commentaires.

Tentatives de saisies rue d’Antin

Qui aurait pu imaginer que l’établissement de la rue d’Antin se trouvait dans le sillage d’un groupe de redoutables fonds « vautours » ? Jamais le nom de BNP Paribas n’a été cité au cours des dernières années dans le dossier argentin. Ironie du sort, la banque a même été victime de tentatives de saisies de la part d’Elliott - 29 en l’espace de deux semaines l’an dernier au siège parisien -, quand celui-ci tentait de recouvrer sa créance que Cristina Kirchner, présidente à l’époque, refusait d’honorer. Pourquoi cibler l’établissement français ? Parce que celui-ci était redevable de certaines sommes envers le pays d’Amérique latine.

Pour comprendre pourquoi BNP Paribas se retrouve mêlé à l’ « affaire du siècle » en matière de dette souveraine, il faut replonger des années en arrière. En 2001, l’Argentine, l’un des marchés émergents préférés des investisseurs internationaux, se déclare en faillite sur près de 100 milliards de dollars. Un véritable séisme. Pour s’en sortir, le pays décide d’organiser une restructuration de sa dette. En 2005, il appelle tous les porteurs d’obligations à échanger leurs titres contre de nouveaux, moyennant une décote d’environ 70 %. Une proposition que certains créanciers jugent inacceptables et refusent. C’est le cas des fonds « vautours ». Selon nos informations, c’est aussi le cas de BNP Paribas, qui a d’ailleurs intenté une action en justice contre l’Argentine à New York. Un jugement de décembre 2007 en témoigne : l’établissement obtient gain de cause et Buenos Aires est sommé de lui rembourser 266 millions de dollars, soit la valeur nominale de six souches obligataires (147 millions) et les intérêts.

Brady bonds

En 2010, le gouvernement argentin décide de rééditer son opération d’effacement de dette. Cette fois, pour des raisons que l’on ignore, BNP Paribas, semble accepter. Des documents juridiques indiquent en tout cas que la banque a l’intention de participer, aux côtés d’autres créanciers. Problème : l’Argentine n’accepte plus les Brady Bonds, ces obligations partiellement garanties par les Etats-Unis, qui ont déjà permis aux investisseurs de récupérer une partie de leur mise. Or, sur ses six types de titres, BNP Paribas détient deux souches obligataires de cette nature. La banque est donc condamnée à les garder, en espérant qu’un jour, l’Etat argentin acceptera de lui en rembourser au moins une partie. Il aura fallu attendre l’accord conclu il y a quelques semaines pour sortir de cette impasse. Si toutes les barrières sont levées par les parlementaires argentins, BNP Paribas touchera bientôt 52,4 millions, ce qui représente environ 150 % de la valeur nominale des créances qui restaient en sa possession. Quand même moins qu’Elliott, avec ses 369 % ...

source : Les Echos

Printed from: https://www.bilaterals.org/./?dette-l-argentine-prete-a-verser